22 octobre 2018

Les dernières girafes de RCA

Les girafes (Giraffa camelopardalis antiquorum) du nord RCA sont des « kordofan », une sous-espèce devenue très rare. Autrefois en abondance dans le parc, leur nombre a fortement décliné au cours des années ’80 : en 1985 on comptait environ 1750 individus ; en 2005 leur population était estimée à 535 individus pour tomber à seulement 162 en 2010. Durant la récente guerre civile, sans possibilité de contrôle sur le terrain et en raison d’une forte circulation de gens armés dans le Nord RCA, cette tendance s’est aggravée.
Pendant le sondage arien de 2017 conduit par ECOFAUNE+ avec l’appui de WCS, seules 2 girafes ont pu être observées. Lors du sondage pédestre de mars/avril 2018, sur 7996km2 quadrillés, 28 traces de girafes ont été relevées, la plupart appartenant au même petit groupe. On sait désormais, grâce au monitoring mis en place par ECOFAUNE+ au cours des 12 derniers mois, que subsiste dans le parc une population de 7 à 8 individus dont un groupe de 4-5 girafes qui occupe la partie sud-est du parc et la ZCV Bamingui-Bangoran et un couple observé dans le secteur sud se déplaçant régulièrement dans la ZCV Koukourou ; et enfin, une jeune femelle de plus ou moins un an, dénommée Kristel par les surveillants pisteurs du Bamingui Bangoran, trouvée dans une zone à 30 kilomètres au nord de la base du parc. Les mouvements de ces groupes sont régulièrement suivis par les surveillants pisteurs et les patrouilles sillonnant constamment le territoire. Un poste de surveillance avancé a été installé dans le secteur de Kristel pour assurer sa sécurité. Il est toujours possible que d’autres girafes existent dans le parc ou dans la zone de Manovo, mais actuellement, on estime que la population totale de girafes au Bamingui Bangoran (et de fait dans toute la RCA) ne dépasserait pas une dizaine d’individus. Avec un nombre assez limité, le seul espoir que l’espèce survive en RCA repose sur une protection intensifiée et stratégique.
Entretemps, le projet ECOFAUNE+ a exploré avec un expert de l’organisation « Giraffe Conservation Foundation », la possibilité de placer des unités satellitaires sur un ou plusieurs individus pour mieux les suivre et les protéger. Mettre un émetteur satellitaire nécessite la capture de l’animal, ce qui comporte un risque, même limité, en raison de l’obligation d’anesthésier l’animal pour mettre en place l’équipement. La visibilité réduite, au sol et de l’avion en raison de la haute végétation pendant la saison des pluies, oblige à attendre la saison sèche pour effectuer cette opération. Avec un nombre aussi limité de girafes dans le Nord RCA, il sera primordial de bien évaluer la faisabilité de l’intervention, notamment en soupesant risques et bénéfices, avant de la confirmer. Entretemps, Kristel aura grandi et avec la sécurisation de la zone résultant du travail des surveillants pisteurs, on espère que d’autres individus seront venus y chercher refuge.